On parle aujourd’hui très régulièrement au sein de notre secteur du pouvoir d’agir, de la pair aidance, de l’empowerment. L’objectif derrière ces mots est relativement simple :
il est de valoriser le savoir expérientiel des patients/personnes accompagnées
- il est de renforcer leur pouvoir collectif d’agir dans le système de santé et médico-social
- Il est d’améliorer la qualité des accompagnements que nous proposons.
On s’aperçoit très nettement que nous passons alors de la notion d’usager d’un service à celui de co-acteur, voire de co-auteur.
Maintenant la question est celle du « comment parvenir à cela ? », comment faire en sorte que ces belles idées et ces beaux objectifs puissent réellement s’inscrire dans chaque rouage de nos quotidiens professionnels.
C’est l’objectif du séminaire « Pair-aidance », organisé par l’UGECAM Ile de France et LADAPT dans le cadre du Groupe National des UEROS, et mis en place le mercredi 22 mars 2023 au sein de la plateforme ACTI+ Lieusaint.
Force est de constater que si au niveau théorique, ces idées tiennent une place importante dans les espaces de recherches ou dans les discours des professionnels, elle reste extrêmement marginale au sein des pratiques concrètes des professionnels du médico-social comme du sanitaire.
Selon nous, si cette place au sein des pratiques professionnelles continue à être faible, c’est avant toute chose parce qu’au-delà de l’adhésion de principe des acteurs professionnels autour des notions de « pair aidance », de « pouvoir d’agir », de « rétablissement « ou bien encore « de capacités », les personnes malades restent, dans le système de représentations technico-socio-professionnelles, « malades ». Cette représentation est tellement forte, car elle s’appuie tout autant sur un ordre social que sur un ordre mental, qu’elle écrase littéralement l’identité principale des personnes touchées par la maladie ou le handicap pour ne laisser apparaitre au final que l’appendice de l’altérité.
Cette réalité donne alors comme résultat l’existence d’une nette coupure entre le niveau discursif (qui n’engage pas) et les pratiques concrètes quotidiennes qui continuent très majoritairement à marquer les personnes par le sceau du stigmate.
Pour dépasser cette dialectique, nous sommes convaincus qu’une des seules solutions réside dans l’instauration d’un processus de « réhabilitation » des structures sociétales.
Le résonnement est effectivement simple :
si les structures sociétales ne sont pas en mesure de percevoir, de porter et de valoriser les capacités et le pouvoir d’agir d’une partie des personnes qui les composent, et cela malgré l’évidente plus-value que cela pourrait générer pour leur propre bénéfice, c’est que ces mêmes structures sont trop limitées et qu’elles nécessiteraient alors d’intégrer elles-mêmes, un processus de réhabilitation afin d’augmenter leur force d’inclusion.
Ce processus, pour qu’il soit réellement efficient, doit reposer selon nous sur une dynamique qui obligera l’ensemble des acteurs desdites structures à coexister dans un même espace façonné par une symétrie relationnelle systématique.
Il s’agit ici en l’occurrence de rétablir pleinement la personne dans son statut de « citoyen » (et donc d’égal à) et non pas de « malade ». Rétablissement qui ne peut passer que par l’action concrète au risque sinon de n’être qu’une pensée philosophique détachée de tout potentiel de changement.
Les actions que nous allons, tous ensemble, élaborer, construire, inventer lors de ce séminaire, porteront l’ambition de parvenir à cela. De parvenir à ne plus être dans les bonnes intentions mais bien dans le changement systémique et profond de nos secteurs de travail.
Changement qui permettra d’aboutir à un enrichissement mutuel, à une « éthique de l’alliance », où chacun contribuera au changement de l’autre, avec l’autre et pour l’autre, dans une volonté de faire avec, de faire ensemble pour vivre ensemble.
